Par Juan Luis Vanrell
Il existe des cépages méconnus d’une grande partie de la population, mais ils ne sont pas exempts de qualité. De plus, le fait qu’ils soient typiques de petits vignobles atténue leur poids face à la demande. Pourtant, il est des vins d’exception que le consommateur laisse passer par pure ignorance. Le bobal est un bon exemple de ce que je dis.
Comme Monastrell, Garnacha ou Cariñena, Bobal est un cépage qui représente parfaitement la typicité des vins méditerranéens. Et, malgré ce qui a été dit au début, c’est le deuxième cépage rouge, après le Tempranillo, en nombre d’hectares. Il s’étend, en particulier, en Castilla-La Mancha, où il a une superficie de plantation de plus de 50 000 hectares, et dans la Communauté valencienne, où il dépasse 30 000, avec une prédominance particulière dans la D.O. Utiel-Requena. Sans être exhaustif, nous ne pouvons pas nous empêcher de boire les vins de Bodegas y Viñedos Ponce et Alto Landón, en Castille-La Manche, et ceux de Bodegas y Viñedos Sentencia, Dussart Pedrón et Mustiguillo, à Utiel-Requena.
J’avoue que, aveuglément, ce n’est pas facile, car c’est un de ces raisins qui coûte un monde à extraire. Ce qui a du sens, car c’est un cépage qui passe souvent inaperçu, même des aficionados, qui n’ont pas l’habitude de traiter aveuglément avec un vin bobal.
Dans le scanner mental des nuances, des odeurs et des saveurs, je passe d’abord par les variétés et les zones les plus typiques, puis, quand je conclus que ce n’est pas quelque chose que je peux facilement identifier, je commence à agrandir la carte géographique. C’est la clé, ouvrez vos yeux et reconnaissez qu’il y a plus de raisins que les traditionnels. A partir de là, il s’agit d’analyser les nuances du vin et d’essayer d’associer les différentes pièces, comme s’il s’agissait d’un puzzle. En particulier, le bobal me rappelle un Tempranillo de Ribera del Duero, mais avec une couche légèrement inférieure, un peu moins d’acidité, des traces vertes de tiges et des notes méditerranéennes.
En relisant cet article, je me rends compte que cette analyse montre une fois de plus que la dégustation à l’aveugle est bien plus qu’un simple jeu. Un exercice mental extraordinaire dans lequel, reliant la géographie, la météo et la connaissance du vin, n’importe quelle partie du monde peut être localisée à l’intérieur d’un verre de vin.